Un plaidoyer contre les violences faites aux animaux. Une très belle écriture pour faire passer des tableaux peu ragoûtants.
Jeune garçon dans une petite ville de province, François vit mal, il est n’est pas à l’aise dans sa famille, il est en conflit permanent avec son père tueur dans un abattoir, il juge sa mère trop passive, soumise à cet homme brutal. A l’école, il est le souffre douleur de ses petits camarades. Il n’est bien que dans la nature au contact des animaux qu’il aime et respecte. Introverti et hypersensible, il ne veut pas poursuivre ses études au-delà du bac, il veut rester seul dans son coin de campagne mais comme il faut bien gagner sa vie, son père le fait embaucher à l’abattoir où il devient, comme lui, tueur.
Son premier contact avec l’abattoir est un choc terrible, les descriptions qu’il fait sont insupportables, on se croirait dans La filière émeraude de Michael Collins (si je ne me trompe pas d’Irlandais). La rencontre avec une femme provoquera le choc décisif qui rompra la tradition qui lie la famille à cette infernale machine à tuer.
Ce livre est bien évidemment un terrible réquisitoire contre l’abatage des animaux en France mais s’il n’avait été que cela, il ne m’aurait pas beaucoup passionné car ce sujet est désormais régulièrement traité dans les divers journaux télévisés. C’est devenu un marronnier médiatique. Ce qui m’a surtout intéressé c’est la fragilité de ce jeune homme devant cette situation sans issue, impossible de trouver un autre emploi dans cette petite ville, impossible de dénoncer les pratiques sadiques de certains employés sans affronter la chaîne de la solidarité interne. Comment échapper à ce qui semble être un destin fatal ?
Et, ce qui m’a le plus accroché dans texte, c’est l’excellence de l’écriture de ce jeune auteur qui est capable de proposer des pages d’une grande poésie dans un contexte d’une brutalité inouïe. Il peut ainsi mettre un immense espace entre la forêt où il l’aime se réfugier et l’abattoir tout proche. Il ne milite pas pour la reconsidération de la chaîne alimentaire, il voudrait seulement que les hommes ne considèrent pas les animaux comme des sujets de souffrance sur lesquels le premier venu peut exercer son sadisme incontrôlable.
J’attends avec impatience qu’il écrive un autre livre moins engagé qui mette plus en valeur son écriture si fluide, si claire, si lumineuse.
Denis Billamboz
Les liens du sang
Roman français de Errol Henrot
éditions Le Dilettante
192 pages – 16,50 €
Parution le 23 août 2017